« La logique vous mènera du point A au point B. L’imagination vous mènera partout ». Einstein.
En sport, cette phrase, j’en suis convaincu. Encore plus pour les grimpeurs, comme vous. Et que, comme vous, face à un bloc, une voie, ce qu’on aime, c’est passer, partout. Alors pour faire suite à l’article de la semaine dernière, nous vous proposons de continuer à aller au-delà des limites, en boostant votre mental. Voici le second épisode sur la visualisation pour le grimpeur.
Visualiser, imaginer, faire de l’imagerie mentale… Les termes sont différents, pour évoquer une seule chose : utiliser sa tête avant de faire. Mais comment ?
Au pied des blocs, lorsque nous lisons un passage, nous faisons tous une erreur : celle de penser que nous avons tous la même façon d’imaginer. Nous ne parlons pas des mouvements, mais bien de la technique de visualisation. Le but de cet article est de rentrer dans le détail, la machinerie mentale de la performance.
Acteur ou spectateur?
Nous allons rentrer directement dans le vif du sujet. Repensez quelques instants à votre dernière session de grimpe. Alors que vous êtes en train de vous remémorer ce moment, êtes-vous plutôt en train de vous regarder grimper, comme si vous étiez spectateur de votre séance, ou êtes-vous en train de grimper? Autrement dit, lorsque vous vous replongez dans cet instant, êtes vous DISSOCIÉ de votre souvenir, ou ASSOCIÉ ? Parfois, il peut y avoir alternance, mais on retrouve souvent une tendance principale.
Eh oui ! nous avons donc déjà un point de départ unique, qui nous est personnel, lorsque nous visualisons notre implication corporelle.
Explications : une personne qui va se « voir » grimper, autrement dit, en dissocié, n’aura pas accès à la projection mentale de l’effort. Par contre, elle aura une vision plus globale des mouvements, de la fluidité, de l’anticipation des ballants (et potentiellement, elle oubliera moins les petites prises de pied qui font toute la différence dans le crux pendant l’action ).
A l’inverse, les grimpeurs qui arrivent à s’imaginer faire, comme s’ ils y étaient, en imaginant ce qu’ils pourraient voir avec leurs yeux, se retrouvent, eux, plongés dans le mouvement. D’ailleurs le coeur s’accélère, la respiration change, la température aussi, les mains deviennent moites… bref, leur mental implique déjà leur corps. Étant aussi dans « leur tête », ils entendent davantage leurs pensées, ce qui peut être bien pour se booster, ou pas.
Ils auront une meilleure anticipation du coût énergétique, mais une moins bonne réorganisation dans leur grimpe si la méthode n’est pas la bonne.
Vous l’aurez compris, ces deux positions ont leurs avantages et leurs inconvénients. Alors comment faire?
Eh bien s’entraîner à être à l’aise dans les deux postures! Apprendre à switcher de l’une à l’autre à volonté, sur commande.
Vous allez appliquer la technique suivante à trois formes d’actions : un souvenir (le passé), une projection dans le temps, comme votre prochaine session grimpe (l’avenir), et un exercice physique (traction, pompes, gainage) que vous pouvez réaliser chez vous (au présent). Pour ce dernier, prenez un exercice où vous connaissez votre nombre de répétitions maximum. La technique s’applique avant de passer à l’action.
Technique :
Etape 1 : Que ce soit pour l’avenir, le présent ou le passé, commencez par vous plonger dans le premier scénario qui vous vient et remarquez quelle est la position ( associée ou dissociée) qui s’impose en premier.
Etape 2 : Commencez mentalement à vous approcher (si vous étiez spectateur) ou à vous éloigner de votre double (si vous étiez acteur). Lentement. Parfois cette étape peut prendre quelques secondes.
Etape 3: Revenez à la position initiale. une façon de dire à votre mental : on change une programmation, mais on a toujours accès à l’ancienne. Souvenez-vous, ce qu’on veut, c’est être bon dans les deux cas de visualisation.
Etape 4 : Passez un peu plus rapidement à la position « opposée » à celle d’origine. Pour ceux qui étaient associés, ne plus avoir de ressenti pendant quelques instants peut être étonnant, alors que pour les autres, avoir accès aux sensations peut les surprendre. La sensation
d’être en train de grimper peut donc venir et repartir sans que vous bougiez, juste par votre esprit.
Etape 5: Une fois cette flexibilité testée, nous allons nous concentrer uniquement sur l’exercice physique. Imaginez-vous en train de réaliser la totalité de votre exercice dans les deux positions de perception. Une première fois en associé, et une seconde en dissocié (ou l’inverse selon votre préférence). Puis arrivés au bout, imaginez simplement que vous allez plus loin, que vous faites plus de répétitions, ou que vous tenez plus longtemps que d’habitude…
Etape 6 : Une fois les 5 premières étapes effectuées, vous avez terminé votre entrainement mental et votre conditionnement. Vous pouvez passer à la pratique physique. A vous de jouer en réalisant l’exercice sur lequel vous venez d’appliquer la technique. Echauffez-vous puis challengez-vous sur un temps à faire, ou un nombre de répétitions max… Comme ça, c’est à vous en quelque sorte de conclure cet article en nous faisant part de vos prouesses et de votre progression.
Cet exercice peut prendre 5 minutes au début, avant de se raccourcir au fur et à mesure de votre pratique… Pour les experts une vingtaine de secondes suffisent. Il y aurait encore beaucoup à dire et à partager avec vous sur la visualisation. Mais on va vous faire patienter afin que vous ayez le temps de bien assimiler les exos.
À vous de jouer maintenant.